Chers frĂšres et sĆurs du Gabon,
Chers compatriotes,
Chers panafricanistes dâAfrique et de la Diaspora,
Pour le colonisateur français, il fallait en 1960 que tout change pour que rien ne change. Notre pays est aujourdâhui rĂ©putĂ© indĂ©pendant, mais nous ne sommes pas souverains dans notre propre patrie. En effet, depuis la prĂ©tendue fin de la colonisation, nous ne pouvons pas porter Ă la tĂȘte de notre pays le dirigeant de notre choix. Lâaccession Ă la magistrature suprĂȘme en 1960 de LĂ©on Mba Minko, premier prĂ©sident du Gabon, fut dĂ©jĂ plus le rĂ©sultat de calculs dâarriĂšre-boutique des forestiers français au Gabon, que lâexpression rĂ©elle de la volontĂ© populaire. Souvenons-nous du coup dâĂtat qui le dĂ©posa en fĂ©vrier 1964, perpĂ©trĂ© par la jeune Ă©lite des forces armĂ©es gabonaises aspirant Ă une vraie souverainetĂ© du pays, et de lâintervention militaire française qui mit fin Ă lâaventure en la massacrant et en rĂ©installant le vieux Mba au pouvoir.
Souvenons-nous encore de la reconnaissance systĂ©matique par la France officielle et des rĂ©seaux, depuis le retour au multipartisme en 1990, de faux rĂ©sultats dâĂ©lections prĂ©sidentielles Ă©cartant toujours le vĂ©ritable vainqueur Ă©lu par le peuple, et de son silence coupable face aux rĂ©pressions sanglantes des contestations populaires qui sâensuivent. Tous ces incidents Ă©maillant lâhistoire politique de notre pays prouvent Ă suffisance que le peuple gabonais nâa jamais eu lâopportunitĂ© dâĂȘtre dirigĂ© par lâhomme de son choix. Sur un tout autre plan, nous ne sommes pas maĂźtres de notre monnaie. Le Franc CFA, cette monnaie hĂ©ritĂ©e de la colonial et arrimĂ© Ă lâEURO nous maintient sous domination française. Cette dĂ©pendance monĂ©taire sert plus les intĂ©rĂȘts des multinationales Ă©trangĂšres que les nĂŽtres. Sachez-le, sans souverainetĂ© monĂ©taire, tout dĂ©veloppement est impossible car nous ne pouvons pas impulser Ă notre pays la dynamique Ă©conomique voulue.
Enfin, la politique Ă©conomique du Gabon nâest pas tournĂ©e vers notre dĂ©veloppement, car cette derniĂšre est assujettie aux intĂ©rĂȘts Ă©trangers. Cette Ă©conomie extravertie, basĂ©e essentiellement sur lâexploitation des matiĂšres premiĂšres et qui importe tous les produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, ne peut garantir le dĂ©veloppement de notre pays car nous restons dĂ©pendants de lâextĂ©rieur. Et cette dĂ©pendance nâest pas fortuite, elle est savamment entretenue par tous les prĂ©sidents français de la Ve RĂ©publique qui se sont succĂ©dĂ©. Car, sans les ressources naturelles des pays de son prĂ© carrĂ© quâelle exploite pour alimenter son industrie, assurer son train de vie et au final garantir son prestige international, la France ne pourrait pas maintenir son rang de 5Ăšme puissance mondiale. Pour toute personne de bonne foi, tout ce que nous venons de dire ne souffre aucune contestation. Ce sont des constats de bon sens, vĂ©rifiables par tous.
Et câest au vu de tout cela que nous affirmons que nous ne sommes pas souverains dans notre pays le Gabon, et que celui-ci nâest indĂ©pendant que de nom, puisque câest la France officielle et des rĂ©seaux, par le truchement de la cellule africaine de lâĂlysĂ©e et de son bras armĂ©, la Françafrique, qui marque de son sceau impĂ©rial le destin de notre pays. Cette situation est proprement inadmissible et intolĂ©rable pour la nouvelle gĂ©nĂ©ration que nous sommes en ce dĂ©but de IIIe millĂ©naire. Nous ne pouvons pas accepter que la Françafrique confisque notre droit Ă la libertĂ© et au dĂ©veloppement plus longtemps.